Quand don de soi se transforme en oubli de soi

Claudine Blier Coach | Thérapeute | Formatrice Conférencière | Auteure

Texte que j’ai écrit il y a quelques années. 

« J’arrive à peine d’une balade de trois jours dans le Bas du fleuve. Balade au cours de laquelle j’ai rendu visite à une personne qui m’est très chère et cette personne n’est nulle autre que ma maman de la campagne ou « Ma maman numéro deux » comme elle s’amusait à me le dire ou à me l’écrire lorsqu’elle signait ses lettres ou ses cartes de souhaits.

Aujourd’hui, j’ai le goût de rendre hommage à la femme qu’elle est et qu’elle sera toujours dans mon cœur. Juste à penser à elle, à contacter son visage et ses grands yeux bleus, à la voir qui essaie de me dire ce qui se passe pour elle sans réussir à mettre les mots justes pour le dire me touche profondément et j’en ai même les yeux humides en ce moment. Elle qui avait une très bonne mémoire il y a quelques années de cela.

Quand je la vois, je me sens privilégiée d’avoir côtoyé cette dame au grand cœur qui m’a prise sous son aile comme si j’étais sa propre fille et qui m’a aimé d’un amour inconditionnel dès le premier jour. Je l’ai vu être tellement fière de dire avec un grand sourire et les yeux pétillants « Regarder, c’est la petite fille que j’ai élevé, elle est comme ma fille. » À l’entendre, mon cœur fond à chaque fois et je le reçois comme un précieux cadeau.

Juste pour vous mettre en contexte un peu, je suis arrivée dans cette famille à l’âge d’un an et demi avec un de mes frères. Maman de la campagne avait déjà 5 enfants plus âgés que moi et la famille hébergeait également un de mes oncles. La porte a toujours été grande ouverte à la visite, à la famille, aux amis et tous ceux qui voulaient bien s’y arrêter pour venir jaser avec nous. La maison était vivante et on s’amusait à refaire le monde.

Je veux reconnaître Maman numéro deux comme une femme dévouée, qui a tout donné ce qu’elle a pu donner, qui a toujours été présente pour les autres quelques soit les situations, qui se soucie énormément de sa famille et de leur bien-être. Elle se soucie tellement du bien-être des autres, qu’elle s’oublie et tait ce qui lui déplait pour ne pas déplaire aux autres et leur faire de la peine. Elle ne dit jamais un mot plus haut que l’autre et elle est d’une bonne oreille. J’ai toujours dit que lorsque Maman va quitter ce monde terrestre, qu’elle sera un ange, je n’ai aucun doute dans mon esprit avec tout ce qu’elle a eu à traverser comme épreuve et pour la qualité de son amour.

Ce qui me désole aujourd’hui, c’est que Maman perd la mémoire. Elle n’est plus en mesure de tenir une conversation, elle ne trouve plus les mots, les souvenirs se mélangent, il n’y a plus d’espace-temps. Elle en oubli même qui elle est ou du moins n’est plus capable de le dire, une autre forme d’oubli de soi. Elle a des images dans sa tête qui la font grimacer, la mettent en colère ou la font pleurer, mais elle ne réussit pas à s’en libérer, elle reste prise avec les larmes aux yeux. Je ne l’ai jamais vu se mettre en colère contre quelqu’un, dire un mot plus haut que l’autre ou même pleurer quand sa coupe était trop pleine. Vous pouvez imaginer le contraste. Aujourd’hui les émotions sont présentes, mais elle ne sait même pas à quoi elles sont rattachées.

Moi, je suis assise face à elle et je vis de l’impuissance. Je l’accompagne du mieux que je peux, mais mon cœur se serre à voir les larmes couler sur ses joues. J’ai mal de la voir souffrir. Je reformule les mots, les émotions qu’elle réussit à nommer. À un moment, je lui demande « Maman, de quoi êtes-vous la plus fière et qui vous remplit de bonheur? » Elle me répond spontanément avec ses grands yeux remplis de larmes « Ma famille! » Même avec ses pertes de mémoire importantes, sa famille occupe la place d’honneur et est au cœur de ses préoccupations. Vous êtes touchante Maman et je réitère que vous êtes vraiment un ange.

En terminant, je m’adresse à vous directement et je vous redis « Je vous aime maman » tout comme je vous l’ai dit en partant ce matin et les autres fois d’avant. Maman, je souhaite profondément que vous soyez comblée par votre famille. Vous méritez tellement d’être bien entourée, supportée et aimée tout comme vous l’avez fait toute votre vie et ce malgré le déclin que vous vivez. Je vous dis MERCI d’avoir été là pour moi, de m’avoir montré le chemin de l’amour inconditionnel et d’avoir cru en moi.

Et vous chers lecteurs, je vous pose la question suivante « Quelle est la place que vous faites aux personnes qui vous sont chères et que vous aimez, qu’ils soient en santé ou en pertes d’autonomie, jeune ou plus âgé? Leur dites-vous que vous les aimez aussi souvent que vous en ressentez le besoin? »

N’hésitez pas à commenter, je serai heureuse de vous lire.

Au plaisir

Claudine Blier,| Coach | Thérapeute | Formatrice | Conférencière | Auteure

Spécialisée en gestion du deuil, pertes et renoncementT

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